Intro : Jusqu’à ce jeudi soir pluvieux du 6 février 2025, je ne connaissais absolument rien à Nc’Nean, mais grâce à une masterclass animée par Suzanne Rivière #suzannetherocks (Brand Ambassador), et l’équipe de la Cave Saint Jacques (Tournai, Belgique), j’ai pu découvrir de la plus belle des manières cette distillerie d’un genre nouveau. Comme toujours chez les voisins belges, professionnalisme, convivialité, prix au top, c’est vraiment le genre d’endroit où on ne veut pas rater la moindre soirée ! Allons-y pour ce long débrief qui j’espère vous amènera à réfléchir à la façon dont sont fabriqués nos spiritueux préférés.

« Made by nature, not by rules »
Bien plus qu’un slogan marketing, une réelle ligne de conduite qui est tenue de bout en bout par la distillerie d’Annabel Thomas. Un tour de force, à contre-courant des grosses distilleries connues et des considérations économiques (et le whisky en ce moment, c’est pas la joie), qui force le respect.
Histoire (version courte) : de 2010 à 2017, Annabel Thomas mature son plan, et trouve les fonds pour mener à bien son projet : transformer la ferme familiale en une distillerie eco-responsable, respectueuse de l’environnement, et affranchie des idées-reçues qui structurent aujourd’hui le monde du whisky écossais. Située dans les highlands, au nord-ouest d’Oban, face à la distillerie Tobermory, le domaine est un havre de paix, seul au fond d’une route côtière qui ne mène nulle part.
L’harmonie avec la nature environnante est l’éthos même de cette distillerie.
Nc’Nean (prononcé « Nac-ni-enn ») provient de Neachneohain, déesse de la légende gaélique. Aussi appelée « The Queen of Spirits », elle était une reine, une chasseresse indépendante, dévouée à la protection de la Nature. Dans cet esprit, tout a été mis en oeuvre pour adapter la ferme au besoin de la distillerie.

Eco-responsabilité :
Nc’Nean est une distillerie d’une ère nouvelle, et la première en écosse par bien des égards :
- Certifiée “B corp”, une reconnaissance des très hauts standards sociaux et environnementaux d’une entreprise.
- Certifiée “organic” (bio), les matières premières utilisées proviennent de fermiers n’utilisant pas de pesticides et de fertilisants. En outre, l’orge est intégralement écossaise et issue de 10 fermes en agriculture biologique.
- Un bilan carbone nul grâce à l’utilisation de 100% d’énergies renouvelables pour la production, une chauffe à la chaudière biomasse.
- Bouteilles en verre recyclé, avec un bouchon compostable en liège et en bois, papier non-traité, tube de protection provenant à 90% de matériaux recyclés… il parait que même l’étiquette se mange !
- Notable également : l’eau utilisée est principalement de l’eau de pluie, stockée dans une « marre » au bord du domaine, permettant à la faune locale de s’abreuver.
Liste de leurs engagements sur leur site : lien.
Mise en route & première cuvée : après avoir recruté une équipe de choc (découvrez leurs sourire par ici : lien), et finalisé les travaux, c’est en 2017 que la distillerie est prête à distiller. La première cuvée voit le jour en 2020, la gammes s’étoffe assez rapidement, évidemment sur des profils plutôt jeunes, que j’ai personnellement trouvé très équilibrés & fins.
Dégustation
Suzanne nous a régalé avec 6 whiskys et un « gin » tout au long de la soirée, de manière assez décontractée, mais a également su rentrer dans certains détails un peu geek (qui m’ont ravi).
Quelques détails techniques qui peuvent avoir leur influence sur les profils : la fermentation tourne atour des 130h (plutôt longue, donc), l’alambic distille entre 70-75°C, des levures de vin, de bières (et bientôt de champagne) sont utilisées, et la plupart des cuvées est travaillée avec plusieurs types de fût. Principalement de l’ex-bourbon (classique) et des ex-fûts de vin STR (Shaved, Toasted & Re-Charred).



Bien que tous équilibrés, fins, ils développent déjà des arômes intéressants, et aucun des profils ne se ressemblait vraiment. Malheureusement mon nez n’était pas au top ce soir là, j’ai donc également fait confiance à mon copilote du soir, Benjamin (de toute façon bien plus avancé que moi sur la dégustation de whisky).
A noter également, tous les whiskys possédaient une texture agréable, qui colle bien au verre, de belles larmes qui s’avèrent assez grasses en bouche. Cela semble venir des orges bio utilisées 😉
Nc’Nean – Organic Single Malt Batch – UB06, 46°
Une entree de gamme relativement classique, mais qui présente quelques notes de pêches, d’agrumes, et un petit côté crème de citron rafraichissante.
Nc’Nean – Quiet Rebel – « Gordon » – Single Malt, 48.5°
La collection Quiet Rebel mais en avant le profil personnalisé d’un des 22 acteurs de la distillerie, ici c’est donc Gordon qui a mis en avant son caractère, et ses affinités personnelles : travaillant depuis plus de 25 ans dans la région et dans l’industrie du whisky, on retrouve du sherry, du STR, et un twist avec un ex-fût de rivesaltes.
Nez : orienté vers les agrumes, et même plutôt l’orange confite.
Bouche : gourmande, sherry, muscat, une légère amertume qui m’a appelé un americano.
Alcool très bien intégré, ça ne chauffe presque pas, comme l’ensemble de la gamme, très beau travail.
A noter que celui-ci a été l’un des plus appréciés par l’assemblée ! Le fromage à l’apéritif s’accordait bien.
Nc’Nean – Quiet Rebel – « Amy » – Single Malt, 48.5°
Nez : fruits à coque, légère noix.
Bouche : entre céréales, abricots, légères notes de citron..
Un profil réconfortant, simple à déguster, accessible.
Nc’Nean – Huntress – « Ochard Cobbler » – Single Malt, 48.5°
La collection Huntress démarrée en 2022 fait partie de la collection du printemps. C’est une édition annuelle qui met en avant le travail des levures (de mémoire) avant tout. Ce Ochard Cobbler a été embouteillé en 2024, et utilise des levures Anchor & Fermentis.
Nez : une belle frangipane, de l’amande, notes typiques de profils « low esters » ?
Bouche : des amandes, du pudding, un côté flan qui… lui a donné son nom ! Le cobbler étant un gateau écossais typique, sur des notes similaires.
Nc’Nean – Huntress – « Woodland Candy » – Single Malt, 48.5°
Mon petit coup de coeur de la soirée, s’il devait y en avoir un – mais j’ai le Huntress 2022 à la maison, je n’ai donc pas craqué, il faut savoir être raisonnable parfois. Les levures utilisées : Anchor, Fermentis, red wine & white wine amènent une belle trame fruitée.
Nez un peu fermé au départ, mais qui s’ouvre petit à petit sur des fruits rouges.
Bouche : fruits des bois, mûre, petites notes herbacées & épicées.
Un profil très intéressant, également apprécié & remarqué par l’ensemble des participants.
Nc’Nean – Single Cask 2023 – « AON 17-170 » – Single Malt, 51.4°
La collection « AON » (prononcé « oune ») met en avant des Single Casks un peu plus anciens, embouteillé pour un évènement ou un marché en particulier, ici le Benelux & Premium Spirits Belgium.
Ce single cask 100% ex-bourbon de 2017 est clairement prévu pour accompagner un dessert : flan, vanille, beurre, boisé. Il accompagnait bien notre dessert chocolaté, mais sinon m’a semblé un peu classique, et un peu trop droit peut être.
SURPRISE DU CHEF !
Ultime dégustation de la soirée, un « new make », distillé comme un gin avec son lot de plantes bio & locales. Il n’est cependant pas assez marqué sur la baie de genièvre, ni distillé à assez haut degré pour être appelé Gin, il est appelé donc appelé « BOTANICAL SPIRIT ».

ORGANIC BOTANICAL SPIRIT, 40°
Au nez, j’ai pensé au vin de myrte corse, bien plus frais. Logique, la myrte fait partie de la liste des ingrédients. Evidemment la baie de genièvre même si peu présente, est reconnaissable.
En bouche, myrth, sauge, camomille & thym m’ont semblé dominer la bataille. Une fraicheur & une petite amertume bienvenue se dégage de ce jus, et semblent parfaites pour revisité un Negroni… Ou en tout cas, on peut l’imaginer ! Suzanne nous l’a bien vendu, et la recette officielle se trouve sur le site de Nc’Nean, par ici.
A titre informatif, cette bouteille semble s’être vendue comme des petits pains (et non, pas de chocolatine sur mon blog, NON NON NON). Ce qui n’est pas forcément surprenant, c’est un produit super sympa, intrigant, et nos voisins belges sont bien plus consommateurs de gin que nous autres français (même si on rattrape rapidement notre retard). J’ai également craqué 🙂
Conclusion
L’histoire est belle, et démarre à peine pour Nc’Nean ! Nous pouvons tous en faire partie, et choisir de soutenir l’ensemble de leurs initiatives, et aider à bousculer les codes du whisky écossais, et j’avoue que l’idée me plait. Les bouteilles sont sublimes, les premiers jus raffinés – même si je consomme d’habitude des choses moins consensuelles – ca donne envie de continuer à suivre l’aventure.
Je ne peux que vous conseiller de déguster leur gamme, si possible autour d’une masterclass dédiée pour mieux vous imprégner de l’esprit de notre déesse de la nature !
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