A la découverte de l’Armagnac

Durant le mois d’aout, j’ai pu visiter le Gers, région rurale du sud de la France qui produit la plus vieille eau-de-vie de France ! Très emballé par l’Armagnac, qui plaît souvent aux amateurs de rhums, je vous propose quelques éléments simples pour mieux cerner ce spiritueux, ainsi qu’un retour sur mes 4 visites de domaines : L’Encantada, Hontambère, Lassalle-Baque & Séailles.

Accès rapide :

  • Intro / petit guide sur l’armagnac
  • L’Encantada
  • Hontambère
  • Lassalle-Baque
  • Séailles
  • Conclusion

Introduction à l’Armagnac

L’armagnac est une eau-de-vie de vin élaborée en Gascogne (Gers, Landes, Lot-et-Garonne).
On parle souvent de la plus ancienne eau-de-vie de France car des écrits retrouvés au Vatican, datants de 1310 mentionnent déjà ses « vertues ». Comme souvent en France, on protège notre savoir-faire, et l’AOC actée en 1936 va définir les zones de production, les techniques, l’alambic à utiliser, etc.

Terroirs

L’aire d’appellation se divise en 3 parties (définies selon l’altitude de chaque zone, même si elle est très relative).

  • Bas-Armagnac (ouest) : sables fauves, boulbènes. C’est ici que se situe la grande majorité de la production, puisque cette zone possède plus de vignobles que le reste, et
    • Produit des eaux-de-vie légères, sur les fruits frais.
  • Armagnac-Ténarèze (centre) : boulbènes & argilo-calcaires (« terreforts »)
    • Produit des eaux-de-vie plus charpentées, épicées, sur les fruits confits.
  • Haut-Armagnac (sud & est) : coteaux calcaires/argilo-calcaires, vignoble plus dispersé
    • Production ultra limitée (2% de l’appellation environ). Je ne vous ferai pas de retour là dessus, n’en ayant que trop peu dégusté. A priori c’est plus floral.

Source : whisky.fr

L’influence des cépages

Dix cépages sont autorisés, mais quatre dominent très largement : Ugni Blanc, Baco, Folle Blanche, Colombard. Bien sûr, ils influencent fortement les aromes présents dans le verre (en complément du travail de distillation, du vieillissement et des techniques utilisées par le maître de chais). Voici un résumé des typicités de ces cépages :

  • Ugni Blanc : majoritairement représenté, il semble donner une colonne vertébrale aux assemblages, c’est plutôt frais, acidulé, assez fin. Pas simple de l’identifier pour ma part.
  • Folle Blanche : cépage historique, mais assez rare aujourd’hui. Beaucoup plus simple à identifier, et particulièrement présent. Des notes très florales (leurs blanches), de la poire. C’est très élégant.
  • Baco : un hybride gascon devenu emblématique, il est particulièrement adapté à la région. Les notes sont rondes, axées sur les fruits mûrs, la prune, mais assez un gras en bouche assez caractéristiques, et de belles notes épicées. Ca semble particulièrement expressif après long vieillissement.  
  • Colombard : un peu moins dégusté lors de mon voyage, il est à priori très utilisé dans les vins du coin, un peu moins dans l’armagnac (victime de son succès?) mais apporte des notes fruitées & épicées.

Source : whisky.fr

Essayer de les reconnaître à l’aveugle mine de rien, c’est pas si simple ! A mon niveau, je suis resté plus marqué par la Folle Blanche – notamment assez jeune, avec ses notes florales c’est assez marquant, que je verrai bien en équivalent d’un ti’punch – et les vieux Baco ont tout pour me plaire : bien gras & épicés, ils peuvent tendre aussi des arômes de framboise, de fruits tropicaux… miam miam ! Evidemment, l’assemblage de plusieurs cépages permet des expériences complexes et intenses.

Pour ceux qui souhaiteraient approfondir les notes de dégustation, cette roue des aromes d’armagnac.fr est très parlante ! Je l’ai retrouvée dans plusieurs domaines (par contre j’l’ai pas trouvée en HD 🥲).

Comment qu’on fait de l’armagnac ?

On part vendanger pardi ! Pour faire de l’armagnac, il faut récolter notre raisin dans une relative jeunesse, le presser, bien évidemment fermenter (sans ajout de sulfites), ce qui permettra de sortir un vin léger, très acide (très bien pour distiller). Vient alors le moment de distiller, et c’est de là que l’armagnac tire son atout !

En utilisant alambic à colonne armagnacais – je rappelle qu’il existe depuis le XIX siècle – une seule distillation suffit à produire une eau de vie puissante (entre 52-72.4% selon la règlementation). Cette unique distillation est d’ailleurs l’une des principales différences avec le cognac (distillation dans un alambic charentais à repasse).

Pour les plus geeks : avec cet alambic, on ne « coupe » pas les têtes et les queues, très chargées en arômes, (c’est aussi l’une des signatures de cette eau-de-vie), la séparation se fait en continue. La distillation à bas degrés permet de garder un max d’aromatique. Pratique cette petite colonne 😎 !

L’alambic de l’Encantada (il peut rouler, mais la distillation ambulante c’est plutôt la spécialité de Rémi chez LB)

Vient alors le moment de vieillir notre Blanche d’Armagnac (qui possède sa propre appellation), et c’est après 12 mois dans des fûts de chêne de 400 litres, principalement en bois de chêne gascon ou de chêne du Limousin, que notre blanche devient officiellement un armagnac !

NB : pour l’originalité dans les fûts, on repassera. L’AOC ne permet pas d’utiliser d’ex-fûts rigolos – comme un fût de chêne américain ayant contenu du rhum, ou du bourbon. Cela n’empêche pas certains de s’amuser un peu, quitte à perdre l’appellation. A ce propos, j’aime beaucoup cette cuvée « L’ENCANTADA Domaine Labeyrie 2021 -Finish Weller » que j’avais acheté en février dernier au Multi Verres Spirits.

Le compte d’âge

Contrairement au rhum, le XO fait 10 ans, et non pas 6 ! Voici quelques rappels essentiels.

Les armagnacs peuvent être commercialisés sous différentes catégories :

Vous voila désormais prévenus, l’Armagnac, c’est un terroir, un savoir-faire, un alambic unique… il est temps de vous parler de mes rencontres, et des dégustations !


Visites

NB : Un résumé vidéo de ces moments est dispo sur mon insta : lien.

L’Encantada : négociants, éleveurs

Et désormais producteurs ! Ils peuvent donc distiller le fruit de leurs 2 hectares de vignes (folle blanche et baco) à Labastide d’Armagnac. ! Vincent Cornu (lien) et ses associés étaient juste à côté de mon logement durant les vacances, j’ai donc eu le plaisir de leur rendre visite plusieurs fois. Il est bon de préciser aussi que j’ai quasiment commencé à boire de l’armagnac de manière sérieuse avec leurs cuvées, notamment au Whisky Live Paris (passez les saluer, et déguster sans modération), donc j’ai un vraiment feeling avec leurs sélections, et je ne suis pas le plus objectif.

Ambiance détendue dans le shop qui leur sert également d’endroit pour embouteiller/étiqueter leurs cuvées, Laure & Vincent sont très accueillants, il nous ont sortir la carte du Gers, conseiller un max de choses à faire dans la région – notamment le Festival D’Artagnan à Lupiac, à ne pas manquer – avant d’aller à la pêche aux bons jus directement dans les chais (plus de 400 barriques à disposition).

Quelques informations sur l’Encantada : depuis 2011 les 3 associés ont sorti prêt de 300 cuvées ! Récemment ils distillent quelques 1500L/an venus de leurs domaines (Pinasson & De Lauze). Vincent aime innover par petites touches, comme avec cette cuvée en finish Weller, ou encore son punch à l’armagnac vieux (délicieux, la bouteille n’a pas tenu la semaine). C’est aussi quelqu’un qui aime promouvoir sa région, un grand gaillard toujours souriant, souvent un beret sûr la tête, le contact est des plus simples et des plus agréables.

Comme nous le savons, le monde des spiritueux reste une niche, surtout pour l’armagnac, et avoir un personnage emblématique pour porter le projet c’est important, je pense que Vincent tient vraiment bien ce rôle, de manière authentique. Côté palais, Laure me dit qu’elle est souvent axée sur des profils plus légers, floraux, là où Vincent (qui a toujours le dernier mot sur les sélections, et le moment crucial où les barriques semblent prêtes à être embouteillées) va plutôt chercher des fruits exotiques, et des textures plus grasses. Chacun son style, mais la patte Vincent je pense que je commence à bien la cerner, et ça me plait.

A ce stade, je pense qu’il est important de reconnaitre le savoir-faire des maîtres de chais. Capables de sélectionner, d’élever, d’assembler plusieurs cépages & barriques (provenant parfois de domaines ou distilleries qui sont aujourd’hui fermées) selon leurs envies, ou les goûts de certains marchés (pour une clientèle spécifique). Si c’était vrai lors de ma visite de l’Encantada, c’était également très vrai dans les domaines que j’ai visité par la suite. Un métier unique, précis, rigoureux ! De vrais magiciens.

Autre info qui a son importance, avant l’arrivée de l’homme qui veut taxer le monde entier (aka Donald), l’Encantada exportait environ 80% de ses cuvées vers les US ! Un chiffre plus haut que la moyenne, mais un discours global que j’ai entendu ailleurs, et qui en dit long sur le contexte politique du moment, mais aussi… sur nos amis américains, qui ont très très bien compris que l’Armagnac, c’est pépite, et que globalement, ça ne coute pas grand chose (en comparaison au whisky, par exemple). A nous également de savoir nous réapproprier cette eau-de-vie, la plus vieille de France, ou de flairer les bonnes bouteilles à ramener à la maison 😏.

N’ayant pas pris de notes de dégustation, je vous renvoie vers mon article de février dernier pour en savoir plus, mais sachez que je suis reparti avec un beau Cuxtan 1999, que c’était bon. Dans les futures arrivées, je l’espère quelques jus plus jeunes qui pour moi ont leur intérêt aussi, peut être un calendrier de l’avent, et des pépites du domaine Petit Clavary, ou encore Saurine.. STAY TUNED. Lien vers l’article précédent.

Enfin, je vous invite fortement à rejoindre l’Encantada Social Club, animé par Laure, qui propose une belle réduction de 15% sur tous vos achats, mais surtout 6 samples/an à déguster à l’aveugle, vous pourrez ainsi participer aux retours et à la sélection des futures sorties… c’est top ! Inscription par ici : lien.

Merci à Laure & Vincent pour le temps passé avec toute la famille, et rdv au Whisky Live !


Hontambère

Difficile de décrire cette rencontre avec Cindy Crighton, directrice du domaine, et Sylvain Lafargue, maître de chais. J’avais rendez-vous à 9h pour une longue journée de dégustation, et je voulais prendre mon temps, mais 4h plus tard (et après quelques péripéties avec mon fils), j’avais l’impression d’être comme à la maison, et je n’avais absolument pas envie de partir ! Cindy, définitivement business woman (& maman hors-pair, le petit l’a vite adoptée) avait fait le déplacement pour nous accueillir et nous présenter ce superbe domaine, et Sylvain n’a pas hésité à dévoiler l’étendue de son savoir-faire, entre dégustations dans les chais, petits secrets bien gardés (que je garde précieusement), et franche rigolade, un moment suspendu qui restera gravé dans ma mémoire. S’il m’a été difficile de résumer nos échanges, je vous propose quelques informations importantes.

Crédit : Armagnac.de (ouép, j’ai pris trop de photos de bouteilles et pas assez du domaine)

Le projet : Hontambère est un jeune domaine de Ténarèze (Gers, autour de Castelnau-d’Auzan) relancé depuis 2008 par un investisseur anglais (merci à lui, et ses copains venus en renfort au fil des années) avec une idée fixe : produire des armagnacs de terroir, bruts de fût, sans additifs ni coloration, au plus proche de chaque parcelle et de chaque cépage. Les puristes (comme moi) sont donc servis, on a des watts, on a de la mâche, la régalade se dessine très vite au fil des explications, et la couleur de certains jus est impressionnante !

Le domaine & les vignes. Le château et ses chais s’inscrivent sur un vaste ensemble d’environ 100 ha. Le vignoble permet de cultiver les quatre cépages d’Armagnac : Ugni Blanc, Baco, Folle Blanche, Colombard. Hontambère produit 60 à 80 barriques par an selon les millésimes.  La distillation se fait sur place dans un alambic armagnacais centenaire autour de 62–67 % (quasi 10% plus haut que la moyenne des autres producteurs), afin de préserver finesse et complexité. 

Mais ce n’est pas tout, ils proposent des armagnacs plus anciens dont les fûts ont été racheté au défunt Domaine Pouchegu (à quelques km de là). Des jus millésimés qui remontent jusqu’à 1973, et dont Sylvain est particulièrement fier, mais aussi un héritage mis en valeur à travers son travail.

Education & Clubs. Lors de nos discussions il a souvent été question d’éduquer les consommateurs : de leur faire découvrir l’armagnac, encore trop peu connu en France, et si prisé à l’étranger. Evidemment, une partie de cette éducation se fait au domaine, mais également sur les salons, autour de masterclass… et en ligne ! Certains passionnés, simples amateurs, embouteilleurs ou encore blogueurs (comme moi) peuvent porter ces messages, et aider à faire connaitre cette eau-de-vie remarquable. Chez Hontambère, j’ai ressenti un réel engouement pour une nouvelle génération de passionnés, l’envie de partager avec ceux qui démarrent l’aventure armagnac, et un vrai respect pour ceux qui représentent fièrement les spiritueux. Ca m’a fait chaud au cœur, parce ma page instagram & le blog se sont construits autour d’une passion du rhum – qui a très vite pris une ampleur démesurée 😂 – mais c’est désormais devenu une mission que de vous partager mes découvertes, les spiritueux, ainsi que les femmes & les hommes qui nous font vibrer à chaque gorgée ! L’influence n’est venue que par votre reconnaissance de mon engagement envers les petits producteurs, nos embouteilleurs français, et les heures que je dédie à vous écrire ce type d’articles. Bref, c’était un petit moment de fierté intérieure que de savoir que ce « travail » était reconnu également par des professionnels.

Dédicace à d’autres passionnés qui m’ont chaudement recommandé auprès de Cindy : Rob Bauer (RumX) et la super équipe de POH Spirits qui n’a jamais tarit d’éloge sur ce domaine. D’ailleurs, à l’heure où je peaufine cet article, je déguste la sélection POH/Hontambere 1988, c’est à tomber par terre!

Dans les chais. Sylvain m’a fait faire « le grand tour », et les cuvées se sont succédées, au domaine pour les versions embouteillées à ce jour, et dans les deux chais qui hébergent les plus belles pièces d’Hontambère. Impossible de passer ce moment avec un papier à la main à prendre des notes compliquées, j’ai préféré me laisser porter et profiter de chaque fût (ne vous inquiétez pas, c’est madame qui conduisait).
Voici tout de même un extrait de certains cuvées qui m’ont marqué :

Blanche d’armagnac (50%) : élaborée à partir des cépages Folle Blanche, Baco, Ugni Blanc et Colombard, c’est tout simplement la blanche que j’ai préféré parmi mes dégustations, et je suis reparti avec une bouteille sans aucune hésitation ! Il y a un beau gras, des agrumes, une certaines fraicheur, et en ti’punch (ou ti’gascon devrait-on dire) c’est superbe. Recette testée et approuvée par la plupart des copains qui sont passés à la maison depuis.

2008 (Colombard, 54.8%) : gras, fruits cuits, belle fraîcheur. Un bel équilibre entre une relative jeunesse, et l’influence du bois qui soutient sans écraser.

1985 (à barrique) : fruits rouges, cassis, grosse gourmandise. J’espère le retrouver en bouteille un jour, vous connaissez mon faible pour les fruits rouges.

2000 (pas encore sorti) : la fraicheur étonnante de la pomme, et un côté acidulé ! Il a particulièrement été apprécié par madame.

1995 (release courant septembre, soyez prêts) : assez porté sur les fruits exotiques, et vraiment mon coup de coeur. Cindy m’a gentiment préparé un sample pour que je puisse le gouter au calme à la maison, j’y reviendrai donc en détail avec un palais plus neutre.

J’ajoute à cela, la dégustation du jour.
POH Spirits, Hontambère 1988 (lien), 100% Ugni Blanc, 44.3% :

Nez : Sirop de pêche, caramel au beurre, notes acidulées.
Bouche : Fruits jaunes, cire, miel, légers épices.
Finale : longue, explosion d’agrumes, et un beau menthol (j’adore) !

J’allais vous dire que c’est ainsi que s’achève cet article sur Hontambère, mais mon cœur me dit que je vais très vite vous en reparler, et qu’un passage express au domaine sur un coup de tête n’est pas du tout exclus ! Merci à Cindy et Sylvain pour cette expérience hors du commun, et l’accueil exceptionnel qui nous a été réservé.


Lassalle-Baqué

Suite des visites ! Je rejoins Rémi Brocardo dans son domaine familiale, j’ouvre la porte de cette vieille « grange » marquée par le temps, les murs noircis, les cuvées posées un peu partout dans la pièce, et s’engage alors une discussion de plus de 2h, très ouverte son activité de distillation ambulante (je vous en parlais en février, par ici), la reprise du domaine familiale, et le monde des spiritueux en général (comme à l’Encantada, on peut trouver plusieurs bouteilles de whisky ou de rhum à portée de main, sa passion pour les bons produits dépasse bien la petite région du Gers).

Un tête à tête passionnant, détendu, et sans langue de bois – comme je les aime ! Voici quelques informations extraites de nos échanges, et ensuite un retour de dégustation.

Crédit : http://lbarmagnac.com

C’est en 1884 que Valérien Morlan viticulteur et producteur d’Armagnac sur la commune de Montréal du Gers, devient propriétaire du château de Lassalle Baqué. Au cœur de l’Armagnac, “La Ténarèze” abrite un terroir vallonné entremêlé de boulbène, terre riche en limons, et de terrains argilo-calcaires. Aujourd’hui l’Ugni Blanc est roi sur le domaine mais le Baco vient le rejoindre suite à une nouvelle plantation en 2021.
Extrait (https://www.lbarmagnac.com).

Vision. Rémi veut préserver l’histoire et le savoir-faire familial tout en adaptant l’armagnac aux goûts modernes. Il se permet des expérimentations, notamment des essais sur les bois américains pour apporter des notes exotiques et vanillées.

Production. Rémi ne levure pas ses vins pour garder l’expression du terroir et utilise très peu d’intrants. La récolte des raisins se fait volontairement à sous-maturité pour préserver l’acidité naturelle et la fraîcheur.

Positionnement & marché. Lassalle Baqué mise sur des armagnacs jeunes, soyeux et accessibles pour élargir son audience, et travaille particulièrement les blanches pour séduire une nouvelle clientèle. L’armagnac reste méconnu et sous-estimé, notamment par rapport au cognac, la clientèle semble difficile à renouveler, et les consommateurs actuels préfèrent souvent les profils boisés et riches en pruneaux. Pas forcément le plus sexy pour les jeunes générations qui recherchent des spiritueux plus frais, plus légers et faciles à mixer. Aucun doute que l’armagnac tonic ait la côte, pour peu qu’il arrive dans le verre des nouveaux consommateurs !

Défis. Les stocks actuels sont limités, les vieux millésimes se raréfient, ce qui pourrait inquiéter sur l’avenir de la filière. La production actuelle correspond presque exactement aux ventes, impliquant un risque de pénurie d’ici 20 ans. De plus les nouvelles générations de viticulteurs préfèrent souvent produire du vin, plus rentable et plus simple à gérer administrativement. Il y a également un effort important à faire pour développer des formations spécialisées, les écoles viticoles du Gers se remettent seulement à parler d’armagnac !

Dégustation

Là encore, les cuvées ce sont succédées, en bouteille ou au fût, je reviens sur quelques jus qui m’ont marqué.

LB Colombard 2021, 51% : Oh la belle poire ! C’est fruité, mielleux, brioché. La démonstration que les jus les plus jeunes ont également un vrai intérêt.

LB Ugni-Blanc 1992, 46.7% : Les yeux fermés j’aurais pensé à un finish bourbon, parce que les fruits exotiques & la vanille m’ont frappé, mais ce n’est pas le cas, c’est un armagnac 100%, résultat d’un assemblage distinctif des cépages Ugni Blanc, Baco et Folle Blanche. Les fruits cuits, la tarte à la mirabelle, et une grosse gourmandise au rendez-vous.

LB 1964, 41% : On entre dans une autre dimension. Le bois n’est pas poussiéreux, mais bien fondu. Le camphre et le café se mêlent au rancio. Bref, un caractère bien différent, plus torréfié.

Je vous encourage également à déguster les blanches, superbes, très onctueuses.

Un grand merci à Rémi pour son temps, et ce moment très enrichissant ! Pas de doute que le domaine est entre de bonnes mains.


Séailles

Fin de journée et aléas du direct avec un enfant en bas âge obligent, j’arrive bien à la bourre au Domaine de Séailles, également très apprécié des amateurs les plus avisés. Heureusement, Alexandre J, bras droit du maître de chais Julien Franclet, est toujours là pour une visite express. Faute de temps, je me contenterai de l’armagnac, sachez néanmoins que les vins sont également une spécialité de la maison !

Le domaine Séailles est un des pionners de la viticulture biologique en vin de Côtes de Gascogne, depuis 1998, rien que ça. C’est surement l’un des secrets de ces armagnacs si réussis ! Au-delà de ça, il est à noter que la plupart de leurs armagnacs présentent des arômes caractéristiques de pruneaux et de fruits confits. Les armagnacs ne sont commercialisés qu’après 20 ans d’élevage, et sont très prisés de plusieurs établissements étoiles au guide Michelin.. Alors, est-ce que c’est si bon que ça ?

La réponse est OUI, sans hésitation. Fin de journée oblige, c’est un peu le rush, le palais est moins affuté, mais j’ai passé une bonne heure avec Alexandre à arpenter le chais, et clairement, tout était très raffiné, une certaine gourmandise s’est dégagée de l’ensemble des jus que j’ai pu gouter : réglisse, vanille, menthol, orange, chocolat, noix, fève de cacao, popcorn, cuir, boisé, rancio étaient au rendez-vous.

Petite particularité sur ce domaine, si les chênes locaux sont majoritairement utilisés, la taille des barriques se situe autour de 310L (plutôt que 400, en général), et sont issues de chênes locaux depuis le début des années 2000.

Dégustation notable & achat coup de coeur, un 1976 avec un finish en fût de Rivesaltes, au sommet de l’indécence (autour de 100€ les 50cl), directement tiré de la barrique, et étiqueté au domaine sous mes yeux.
On va pas se mentir, ça fait son petit effet. Je reviendrai en détails sur la dégustation lorsqu’elle sera ouverte 😉

Clairement, un domaine où il me faudra revenir pour visiter les vignes, tester le vin, et approfondir.
Encore merci à Alexandre d’avoir fait le maximum pour m’accueillir malgré l’horaire tardif, et la bises aux voisins que je n’ai pas pu visiter en cette belle semaine au pays de l’armagnac : ce n’est que partie remise !


Conclusion

Même 3 semaines après mon retour à Lille, il est difficile de retranscrire ce voyage initiatique dans le Gers. Des territoires d’une ruralité rare, des habitants au caractère bien trempé mais si accueillants, et des vignobles peu connus, qui produisent de véritables trésors.
Si je connaissais déjà bien L’Encantada, j’ai pu y confirmer mes gouts, d’autres visites marquantes se sont succédées : Lassalle-Baqué où Rémi reprend un domaine familial de la plus belle des manières, Hontambère, – révélation pour moi – à la fois dans l’armagnac, mais aussi à travers son duo exceptionnel (Cindy et Sylvain), enfin un petit gout d’inachevé chez Séailles où j’aurai aimé passé bien plus de temps.
Il est clair que l’histoire ne s’arrêtera pas là, et que je retournerai au pays de l’Armagnac ! Je vous invite bien entendu à visiter cette belle région, à découvrir par vous-même ce savoir-faire, ces traditions, et les nombreux domaines qui vous régaleront (ils étaient bien trop nombreux pour tous les faire, mais Danis, Dartigalongue me restent en tête).

Merci d’avoir suivi cet article (un poil long, à mon habitude), et pourtant si court par rapport au ressenti de mes visites. Merci à tous les amis qui m’ont conseillé ces domaines, aux producteurs de m’avoir accueilli les bras ouverts, et aux habitants de cette région fort sympathique.

L’armagnac c’est la vie ! Faut s’y mettre les amis. C’est un véritable trésor national qui nous tend les bras, qui peut plaire aux nouveaux arrivants comme aux plus exigeants. Cette capacité à se déguster pendant des heures ou à s’éclater avec un cocktail simple est vraiment plaisante, et permet d’ouvrir les portes des spiritueux. A vous de l »essayer, et ne tardez pas trop sinon les ricains vont tout piquer 😉 !

THE JACK DROP – LE BLOG QUI PARLE DE RHUM, AGAVES & AUTRES SPIRITUEUX – BASÉ À LILLE

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